Muséomix : un évènement international pour réinventer les expositions du Musée de la Civilisation

Le Musée de la Civilisation de Québec accueillait du 8 au 10 novembre dernier l’évènement Muséomix, qui s’exportait ainsi pour la première fois en Amérique du Nord. Il s’est déroulé simultanément en France (au Château des Ducs de Bretagne à Nantes, au Louvre-Lens à Lens, au Musée dauphinois de Grenoble et au Musée des Arts décoratifs de Paris où a été créé Muséomix en 2011), en Grande-Bretagne (Ironbridge Gorge Museums de Shropshire) et bien entendu au Musée de la Civilisation à Québec.

 

Le principe ? Les musées transforment certaines de leurs expositions et collections en terrains de jeux qu’ils ouvrent à des spécialistes et professionnels de l’histoire, de la muséographie, du numérique, de la robotique, du design, de la communication et autres spécialités qui n’échangent pas forcément entre elles.

 

L’objectif est que les collections ouvertes et les thèmes proposés éveillent l’intérêt des différents spécialistes ainsi mis en collaboration, qu’il se crée des équipes mixant un peu toutes les professions et que chaque équipe ainsi constituée « réinvente » l’exposition de son terrain de jeu de manière différente, plus moderne, plus attractive, plus interactive. En deux jours. C’est bref et le résultat final présenté au public le troisième jour (dimanche 10 novembre dernier, donc) a l’allure d’un bricolage, mais d’un bricolage hautement technologique et inventif et qui fonctionne, ce qui ne peut que forcer l’admiration.

 

Et si ces réinventions ne sont présentées au public que quelques jours, le résultat à long terme peut se montrer moins éphémère. Tout d’abord par la collaboration interdisciplinaire générée par la mixité des équipes, qui noue des contacts et peut donner lieu à des collaborations futures voire à des entreprises spécialisées dans la muséographie interactive (par exemple). Ensuite parce que les musées peuvent éventuellement récupérer les idées pour moderniser leurs expositions.

 

Citons en exemple le cas du Musée de la Civilisation gallo-romaine de Fourvière, à Lyon, qui a participé à Muséomix 2012. Trois idées ont été retenues par le musée et les expositions modernisées ont été présentées au public dans le courant de l’année 2013. Il s’agissait de l’actualisation par truchement numérique d’une maquette de la cité gallo-romaine de Lugdunum datant des années 1950 en tenant compte des découvertes archéologiques plus récentes, d’une course de chars robotisés sur la mosaïque du cirque romain et de la traduction luminescente des épitaphes (qui racontent souvent l’histoire du défunt) des tombes romaines.

 

La fin de semaine du 8 au 10 novembre a donc vu le Musée de la Civilisation être le théâtre d’un bouillonnement d’idées et de créations. Dix stands ont ainsi vu le jour au sein des expositions du musée. L’Art du Secret se propose de transformer l’exposition Le Temps des Québécois en chasse au trésor à la recherche de trois objets à scanner au téléphone intelligent pour en ramener l’explication dans un cabinet secret. L’Enfer derrière un rideau rouge, un livre libertin subit le sort de la censure. Le Thermomix rescopé rend quant à lui plus vivante L’exposition scientifique Tour de Terre. Artualité propose aux visiteurs de s’improviser artiste et de voir leur œuvre défiler sur un écran dans le musée. Le Café inuit met plus en valeur les œuvres d’art inuit exposées à la cafétéria. Court-Court-Métrage invite le visiteur à créer son propre film d’animation au sein d’une grande boîte à images. (Re)crée ton musée laisse libre court à l’imagination des habitués qui, une fois toutes les ailes du bâtiment visité, peuvent en changer la position pour donner une nouvelle forme au bâtiment, et ce rien qu’avec le corps, par reconnaissance optique ! Enfin, Musées à Images fait pénétrer les visiteurs dans les autres musées de Québec liés au Musée de la Civilisation… sans quitter le hall d’entrée de celui-ci.

 

Je tire mon chapeau à toutes les équipes qui ont su monter et réaliser de tels projets en si peu de temps.

 

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Crédits photographiques : Rémi Bouguet, tous droits réservés.

 

Les observateurs avertis auront remarqué que je n’ai cité que huit des dix projets. C’est que, sans renier la qualité des autres, il y a deux projets qui ont attiré toute mon attention d’historien et d’animateur radio pour 3600 secondes d’histoire.

 

Tout d’abord, une adaptation de l’exposition historique Le Temps des Québécois pour les non-voyants : Tire-toi une bûche, assied-toi dans l’Histoire. Une bande rugueuse crissant sous la semelle guide les visiteurs au travers de l’exposition, les invitant à s’asseoir régulièrement sur des chaises et des fauteuils installés aux époques marquantes du Québec. Une fois confortablement installé, le visiteur peut écouter les explications orales, s’imprégner de l’ambiance sonore de l’époque, et pourquoi pas sentir des odeurs affiliés et toucher des reproductions d’artefact, profitant ainsi pleinement sa visite.

 

C’est mon premier coup de cœur et j’espère que le Musée de la Civilisation va développer ce projet pour faciliter l’accès à la culture aux malvoyants et leur ouvrir grand les portes du musée, ce lieu de culture et de connaissance, certes, mais aussi de rencontre et de sociabilité.

 

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Toute l’équipe de Tire-toi une bûche. De gauche à droite : Roxanne Huard (graphisme), Mathieu Frenette (codage), Marie-Claude Baillargeon (fabrication), Anny Guindon Varvarikos (médiation), Maryse Morin (facilitatrice), Coline Niess (représentante du Musée de la Civilisation), Julie Guinard (contenu historique) et Brigitte Campeau (communication).

Crédits photographiques : Brigitte Campeau (avec son aimable autorisation), tous droits réservés.

 

Enfin, Il était mille fois… Réinvention de l’atelier pour enfants Il était une fois, qui prend alors une dimension supérieure et tellement plus amusante. Parce que les contes font partie de la culture populaire et ont aussi leur histoire à raconter. Parce qu’ils ont une morale, parce qu’ils peuvent être réinventés, parce que ce sont des parcours initiatiques que l’on donne en exemple aux enfants, à qui on les lit le soir pour les faire rêver. Rêver dans le creux du lit, c’est bien… mais les vivre au musée c’est mieux. Laissez vos bambins enfiler des costumes et se transformer en Princesse, en Chaperon rouge, en Prince charmant, en Grand Méchant Loup, en Chat botté, en Fée, que sais-je encore, et se lancer à l’aventure entre les arbres creux et magiques du sous-sol du musée, aller d’énigmes en énigmes pour finalement être récompensé à la fin.

 

Pour en savoir plus sur ce projet, le lien vers les prototypes de Muséomix (http://www.museomix.org/prototypes/il-etait-mille-fois/#equipe) et celui vers le blogue de l’émission radiophonique Tu parles d’une histoire sur Radio Basse-Ville, tenue par Catherine Ferland, collègue et confrère historienne et animatrice radio et également membre du projet Muséomix (http://cferland.wordpress.com/tu-parles-dune-histoire/emission-du-16-novembre-2013-musees/).

 

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L’équipe d’Il était mille fois. De gauche à droite : Chantal Demers (graphiste au Musée de la Civilisation), Marc Ouellet (graphiste), Marie-Ève Courchesne (médiatrice culturelle), Paméla Bisson (vidéaste) et Catherine Ferland (historienne). Absents de la photo : Mélanie Ducani (programmeure) et Antoine Dupin (spécialiste des communications).

Crédits photographiques : Rémi Bouguet, tous droits réservés.

 

Affaire à suivre… Peut-être bientôt en exposition permanente remasterisée au Musée de la Civilisation ? En tout cas, bravo à tous !

 

Rémi Bouguet, pour 3600 secondes d’histoire

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